Soutenance de thèse de Camilo Leon Quijano

Camilo Leon Quijano a soutenu à l'EHESS sa thèse intitulée

Fabriquer la communauté imagée.
Une ethnographie visuelle à Sarcelles

et préparée sous la co-direction de Anne Monjaret et de Juliette Rennes,

le lundi 2 novembre 2020, devant un jury composé de :

♦ Mme Anne Monjaret (Directrice de thèse), CNRS

♦ Mme Juliette Rennes (Co-Directrice), EHESS

♦ M. Roger Canals, Université de Barcelone

♦ Mme Cécile Canut, Université Paris Descartes

♦ Mme Sylvaine Conord, Université Paris Nanterre

♦ M. Boris Petric, CNRS
 

Présentation de la thèse

⇒ Résumé

Cette thèse étudie la vie sociale des images à Sarcelles, ville située dans la banlieue nord de Paris. Elle porte sur les matériaux et les interactions photographiques qui définissent socialement cet espace. En partant d’une ethnographie visuelle menée entre 2015 et 2018, elle explore les pratiques imagées, ces activités qui encadrent la fabrication, le partage et l’accomplissement social des images. Le projet général de cette recherche est l’étude de ce que j’ai nommé une communauté imagée. Cette notion permet d’analyser l’écologie des pratiques visuelles à partir d’une démarche à la fois pragmatique et phénoménologique. Si la plupart des ethnographies emploient la photographie comme un moyen pour décrire ou illustrer des phénomènes sociaux, cette thèse propose un revirement méthodologique et épistémologique : c’est en photographiant qu’il est possible d’étudier les pratiques visuelles dans l’environnement social où elles se produisent. Dans cet esprit, il est question ici de proposer une ethnographie des images et par les images, c’est-à-dire une photo-ethnographie critique, réflexive et participative pour interroger la dimension sensible des expériences sociales. Au croisement de la sociologie, de l’anthropologie, des études urbaines et des études visuelles, cette recherche contribue au développement de l’ethnographie visuelle. Sur la base d’une phénoménologie des expériences visuelles, elle explore les multiples configurations des affects urbains en suivant une démarche non indicielle. Elle accorde ainsi une attention particulière aux processus de fabrication, d’échange, de publicisation et d’accomplissement des images sur le terrain. Cette thèse s’articule autour de cinq chapitres. Le premier étudie l’économie des images au niveau municipal. Il fait un état de l’art des productions photographiques sur Sarcelles et examine les stratégies institutionnelles et artistiques déployées dans la définition des récits portant sur cet espace. Le deuxième analyse l’écologie des échanges visuels au niveau local à partir des formes de résistance imagée des citoyen-ne-s sur les médias et les réseaux sociaux. Le troisième explore le rapport entre expérience spatiale et photographie sur la base d’une activité immersive, sensorielle et non indicielle. Le quatrième chapitre sonde la façon dont l’espace urbain est vu et vécu par les habitant-e-s à partir de méthodes participatives. Ces pratiques collaboratives permettent d’interroger les représentations de l’expérience en ville en problématisant la place de l’enquêteur et de l’enquêté-e sous un prisme intersectionnel. Enfin, le cinquième chapitre décrit les différents degrés de publicisation des récits photo-ethnographiques en explicitant l’accomplissement de ces derniers à l’intérieur et à l’extérieur de la ville, notamment dans le milieu photojournalistique. Il s’agit donc ici d’enquêter sur les modalités de réception ainsi que sur la définition publique et médiatique de la communauté imagée. En somme, cette thèse contribue au développement de l’anthropologie et de la sociologie visuelle en proposant une approche à la fois phénoménologique, pragmatique et critique fondée sur l’engagement photographique de l’ethnographe sur le terrain.