Soutenance de thèse d'Elsa Forner Ordioni

Elsa Forner Ordioni a soutenu sa thèse de sociologie,
préparée sous la co-direction de Nicolas Dodier et d'Alexandra Bidet, intitulée

“Whatever Works”.
Sociologie des thérapies  cognitives et comportementales.

Le 1er février 2019, à partir de 15h30, à l'EHESS,
en salle 13 du 105 Boulevard Raspail 75006 Paris

devant un jury composé de :

♦ Rémy Amouroux, Professeur, Université de Lausanne, examinateur

♦ Alexandra Bidet, Chargée de recherche, CNRS, directrice

♦ Jérôme Denis, Professeur, Mines ParisTech

♦ Nicolas Dodier, Directeur d'études, EHESS, directeur

♦ Alexandre Mathieu-Fritz, Professeur, Université Paris-Est Marne-la-Vallée, rapporteur

♦ Livia Velpry, Maîtresse de conférences, Paris 8 Vincennes-Saint Denis  

Résumé :

Comment les thérapies cognitives et comportementales, techniques issues du laboratoire, provenant d’Afrique du Sud et des États-Unis, ont-elle été importées en France comme assemblage thérapeutique ? À partir d’une enquête ethnographique, cette recherche retrace la trajectoire des thérapies cognitives et comportementales et la façon dont celles-ci se sont progressivement diffusées dans le champ de santé mentale, pour s’inscrire dans le paysage contemporain de l’intervention psychothérapeutique. Elle éclaire les conditions historiques et sociales dans lesquelles les thérapies cognitives et comportementales ont progressivement émergé comme outil thérapeutique pour les patients, les acteurs de la santé publique, les importateurs historiques, les médecins et les psychologues. Alliant observations (de consultations individuelles et de thérapies de groupes), entretiens ethnographiques (auprès d’importateurs « pionniers », de patients, de psychiatres, de psychologues, d’acteurs de la santé publique et d’acteurs associatifs), et collecte d’archives (scientifiques, institutionnelles, historiques), la démarche combinatoire de cette enquête a permis de recueillir le point de vue d’acteurs variés et d’éclairer les tensions qui surgissent entre des mondes de soin hétérogènes, aux conceptions de la pratique et de l’humain parfois antagonistes.

À cette entreprise de diffusion, menée par des professionnels et des intermédiaires culturels, ont répondu bientôt des patients, entrepreneurs de leur trouble. À la rencontre des mouvements d’émancipation de ces patients et de leurs revendications en matière d’autonomie, qui associent de nouvelles compétences à la figure émergente du patient, les TCC proposent un modèle aisé à prendre en main et libre d’usage : il semble offrir de multiples prises pour l’action à destination de patients désireux d’outils pratiques rapides à utiliser, whatever works.

Mots clefs: TCC, psychothérapie, cognitif, comportemental, hybridation, assemblage.

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How did cognitive and behavioral therapy, coming from both South Africa and United States, have traveled to France as a therapeutic assemblage? Based on a field study, this research aims to trace the trajectory of cognitive and behavioral therapy and the way they progressively broadcast through the mental health field to be part of the contemporary mental health scene.

My inquiry sheds light on the historical and social conditions in which CBT emerged as a therapeutic tool for patients, public health policy actors, historical importers, doctors and psychologists. Dealing with ethnographic observations (individual consultations and groups), interviews (with historical pioneers, both psychiatrists and psychologists from hospital and private practice, patients, public health policy and community-based organizations workers) collecting historical, scientific, institutional archives, the plural approach of the inquiry aims to gather various actors stakeholder’s perspectives in order to enlight tensions brought in heterogeneous worlds of care, where several conceptions of practice, human being’s antagonist ontologies cohabitate. Researchers, experimenters, translators, doctors, psychologists, public health policy professionals all contributed to translate and make cognitive and behavioral therapy intelligible in France. They came to participate, in some various ways, to promote them in the field of French psychotherapy.

To this broadcasting collective enterprise, leaded by professionals and culture-brokers, patients soon responded, also becoming the stakeholders who contributed to mediate CBT. Crossing values such as self- reliance movements associated with new emerging patient-driven figure, CBT seems to offer a comfortable grip, easy to handle and to fit-in as a tool for everyday life. CBT stakeholders, driven by a pragmatist impetus in their collective enterprise, seem to be unified by the willing to find ways – whatever works – which can be used as resources for action, paying attention to singularity of objects in action to help patients.

Keywords: CBT, psychotherapy, cognitive, behavioural, assemblage, hybridation.