Type et date de soutenanceSoutenance de thèse

Chapeu Mangueira et ses mondes imbriqués : Ethnographie d’une favela « pacifiée

Joana Sisternas Tusell

Résumé

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Cette thèse s’inscrit dans les champs de la sociologie et de l’anthropologie de la ville et prend la forme d’une monographie de quartier populaire. L’enquête prend comme point de départ la politique de « pacification » mise en place en 2008 dans certaines favelas de la ville de Rio de Janeiro en vue de la tenue des mégaévènements sportifs internationaux (Coupe du Monde de football de 2014 et Jeux Olympiques de 2016) et étudie finement l’évolution de l’une d’entre elles : Chapéu Mangueira. Douze mois vécus dans cette petite favela centenaire (2012-2015), ont permis de repérer et d’accompagner le passage à la clandestinité temporel du trafic de stupéfiants et la fin du quadrillage de l’espace de la favela par des « bandits » armés ; la pénétration massive dans la vie quotidienne des pouvoirs publics, du marché touristique et du marché immobilier, puis leur désertion progressive ; et la transformation des configurations politiques au sein de la favela, dont la perte de contrôle de l’association des habitants, classiquement l’interlocuteur des politiques.  Si certains pronostiquaient un avant et un après de cette politique de grande envergure, l’enquête montre que la politique de « pacification » traverse le quotidien de la favela sans en transformer radicalement l’histoire. Les expériences vécues par les habitants des favelas en contexte de « pacification », dont le recul de la violence armée, le gain de certaines libertés, l’amélioration discrète des services, la rencontre avec des étrangers, le démarrage de nouveaux projets collectifs et individuels, mais aussi la répression de l’État, le contrôle des conduites, l’aménagement polémique du territoire…, s’inscrivent dans une histoire ancienne d’interventions publiques et de luttes, résistances et mobilisations locales.  L’ethnographie menée à Chapéu Mangueira restitue cette temporalité longue des évènements et des transformations observés à Chapéu Mangueira en contexte de « pacification ». Elle s’attache à décrire et comprendre le monde de la favela tel qu’il apparaît au quotidien et tel qu’il est vécu et raconté par ses habitants. La favela de Chapéu Mangueira y apparaît comme un réseau hautement complexe de relations en processus permanent de (re)configuration où le monde de la rue et celui de la maison, celui de la maison et de la famille, celui de l’évangélisme, du trafic de drogues, des associations de quartier et du marché touristique sont profondément imbriqués. Recherche fondamentalement empirique, elle mobilise des techniques d’enquête aussi diverses que le dessin, la cartographie, l’étude des réseaux de parenté, le récit de vie, l’observation participante, les documents personnels, les entretiens et les conversations informelles au bistrot… En partant de la description de la vie quotidienne qui se déroule dans l’espace de la rue, de l’étude de l’évolution des maisons et des configurations de maisons ou, encore, de l’analyse des réseaux de parentèle, la thèse dessine, d’un côté, une sociogenèse de la formation d’un quartier et corrélativement d’une communauté urbaine et de l’autre, elle en décèle l’organisation sociale.

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Jury

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  • M. Daniel Cefaï (Directeur de thèse), EHESS
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  • Mme Neiva Vieira da Cunha (Co-Directrice), Universidade Estadual do Rio de Janeiro
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  • M. Pedro Abramo, Universidade Federal do Rio de Janeiro
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  • M. Mathieu Berger, Université Catholique de Louvain
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  • Mme Agnès Deboulet, Université Paris 8 Vincennes Seine Saint-Denis
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  • M. Dominique Vidal, Université Paris 7 Paris Diderot
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