Type et date de soutenanceSoutenance de thèse

Féministes des champs : l'espace de la cause écoféministe au sein du mouvement de retour à la terre. France, Etats-Unis, Nouvelle-Zélande, 1970-2019

Constance Rimlinger

Résumlé

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La thèse porte sur les interrelations entre l'engagement féministe et l'engagement écologiste de personnes appartenant à des minorités sexuelles ou de genre créatrices d'écolieux qui sont à la fois des lieux de vie, de travail (notamment agricole) et de diffusion de modes de vie alternatifs s'inscrivant dans une démarche de décroissance et de simplicité volontaire. À partir d’une approche localisée et comparée combinant plusieurs mois d’ethnographie multisituée dans des lieux en France, aux États-Unis et en Nouvelle-Zélande, et la réalisation d’une quarantaine d’entretiens, cette recherche interroge les différentes articulations théoriques et pratiques bâties par les actrices entre leurs engagements féministes, écologistes et en faveur de la communauté LGBTQ+, ainsi que la manière dont ce polyengagement se configure autour d’une politisation du mode de vie.  La première partie de la thèse situe les expériences étudiées dans des phénomènes plus larges (le retour à la terre, l'émergence et l'évolution de l'écoféminisme, les nouveaux mouvements religieux) et dans une histoire au long cours. La deuxième partie distingue trois configurations écoféministes et cerne leurs caractéristiques et enjeux propres. La configuration « différentialiste séparatiste » et la configuration « queer intersectionnelle » ont en commun la recherche de création d’un entre-soi communautaire en milieu rural, et le fait de sensibiliser des personnes LGBTQ+ à l’écologie. Tandis que la première s’inscrit dans un féminisme différentialiste et revendique une non-mixité stricte entre femmes, la deuxième s’inscrit dans un féminisme queer intersectionnel et promeut davantage une non-mixité « sans hommes cisgenres ». Dans la troisième configuration distinguée, « holistique intégrationniste », les enjeux identitaires et les clivages entre des courants de pensée féministes différents s’effacent au profit d’une recherche d’inclusion dans le milieu des alternatives agricoles et écologistes. Bien intégrées localement, les néo-rurales regroupées dans cette configuration contribuent à sensibiliser les populations de leurs territoires d’adoption aux enjeux de genre par leur présence et le modèle alternatif qu’elles représentent.  Suite à l’analyse détaillée de ces configurations, qui s’appuie notamment sur des études de cas monographiques, la troisième partie de la thèse se penche sur les enjeux transversaux : la prise de distance à l’égard des normes de la socialisation, la traduction de la quête émancipatoire féministe dans des expérimentations concrètes, la place de la nature et de l’écologie ainsi que du travail de la terre dans les projets, et enfin, dans certains cas, le développement d’une spiritualité qui (re)sacralise la Nature et place le « féminin » au cœur de son échelle de valeurs.  Cette recherche met en évidence l’existence non pas d’un écoféminisme terrien qui prendrait la forme d’un mouvement organisé et unifié, mais d’une nébuleuse d’initiatives faiblement connectées entre elles et ancrées dans des cultures militantes différenciées. Au-delà de leur hétérogénéité, ces dernières ont en commun de faire converger, en actes, une quête d’émancipation féministe et la recherche d’une manière d’être-au-monde plus respectueuse de l’environnement. Cette convergence accorde une importance particulière au fait de prendre soin (care), à la subjectivation, et à la revalorisation de l’attachement à la terre, au corps, à une communauté.

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Jury

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  • Mme Geneviève Pruvost (Directrice de thèse), CNRS
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  • Mme Irène Becci, Université de Lausanne
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  • M. Michel Lallement, CNAM
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  • Mme Delphine Naudier, CNRS
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  • Mme Sylvie Ollitrault, CNRS
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  • M. Geoffrey Pleyers, Université Catholique de Louvain
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